Numéro 1

Édito

Un nouveau périodique, pour réfléchir la société numérique

Ce n’est pas un scoop : le numérique a pris une place centrale dans nos vies. Facilité de communication, capacités nouvelles de traitement des informations… les outils numériques sont devenus incontournables dans une quantité de situations et d’usages. La crise entraînée par la pandémie de Covid-19 a accéléré cette tendance et accentué l’infiltration du numérique au cœur de nos relations sociales, tant professionnelles qu’intimes. Mais les outils numériques ont aussi leurs revers.

Jusqu’où irons-nous ? Jusqu’où accepterons-nous de (dé)placer les curseurs du numérique dans nos vies ? Jusqu’où accepterons-nous de jouer le jeu, du tout connecté ? Nous faut-il poser des limites à cette dématérialisation digitale ?

Une généralisation qui pose question

À l’heure de l’urgence climatique, le coût écologique lié à notre société 3.0, à l’Internet dans les nuage Cloud On parle de « cloud » ou de « nuage » (en français), pour désigner une infrastructure logicielle ou de stockage hébergée ailleurs sur l’internet. Loin de l’imaginaire immatériel que le terme – et souvent les visuels utilisés – illustrent, ces services nécessitent des machines performantes et polluantes, hébergées dans des datacenters. On entend parfois que le cloud est « l’ordinateur de quelqu’un d’autre », cette expression souligne que les données qui y sont enregistrées se trouvent sur une machine appartenant à une autre personne, association ou entreprise. s et à son fonctionnement constitue un problème de taille. La conception des interfaces numériques, inscrite dans des modèles économiques fondés sur la captation des données et de notre attention, favorise des formes d’addiction et des usages délétères et liberticides. Nos comportements sont monnayés à des fins publicitaires. La consignation de nos faits et gestes numériques nourrit les banques de données d’une société de surveillance globale. Sur le plan psychologique, on ne compte plus les souffrances entraînées par une existence sur-connectée. Enfin, les processus démocratiques pâtissent des « fake news » circulants aux quatre vents. Et ce n’est bien sûr pas une liste exhaustive…

Une initiative de l’ASBL Tactic

Central, le numérique fait pourtant, en tant que problématique — humaine, sociale, politique, démocratique, écologique — encore peu l’objet de débat public, souvent parce que ses aspects techniques effrayent et paralysent. S’orienter dans le monde d’aujourd’hui et y exprimer sa citoyenneté signifie pourtant aussi comprendre la nature et les enjeux du monde numérique dans lequel nous vivons et en discuter pour pouvoir prendre position et agir. C’est à cet impératif que souhaite répondre le projet « Curseurs », une initiative de l’ASBL Tactic réalisée avec le soutien d’un groupe de bénévoles provenant de différents horizons. N’hésitez pas à nous soumettre vos contributions !

Avec « Curseurs », nous souhaitons sensibiliser un public large et contribuer au débat sur l’avancée à marche forcée de la société numérisée. Nous cherchons à rendre visible les infrastructures, la matérialité, la géopolitique, l’économie, l’histoire du numérique et des rapports de pouvoir qui y sont liés.

« Curseurs » ?

Pourquoi « Curseurs » ?

Le début de cet édito donne quelques éléments de compréhension. Le dictionnaire définit d’abord le curseur comme une « pièce mobile comportant un index que l’on peut déplacer à volonté le long d’une glissière, généralement graduée ». Ni technophobe ni techno-enthousiaste, l’approche de « Curseurs » se veut techno-critique et souhaite, plutôt que prescrire, inviter à se positionner vis-à-vis des enjeux sociaux et techniques.

Mais un curseur, dans le monde de l’informatique, c’est aussi cette petite flèche, devenue familière, que l’on manipule avec la souris, ou l’indicateur clignotant qui nous montre notre position dans un traitement de texte. Pointeur mettant en évidence l’information, le curseur de l’informatique imprégnera l’identité visuelle de notre mise en page.

Enfin, l’étymologie du mot curseur — un héritage du mot anglais cursor lui-même emprunté à l’ancien français — c’est le coureur, le messager. Or, publier, n’est-ce pas porter un message ?
Avec un rythme de publication semestriel et un ancrage local pour une partie de ses contenus, Curseurs se veut une ressource pour fournir des outils de réflexion critiques et pratiques pour appréhender la société numérique.

Curseurs, des dossiers thématiques

Au centre de chaque numéro, un dossier thématique abordera une problématique principale mais une place sera aussi donnée à d’autres articles hors dossier. Les différents numéros seront aussi l’opportunité de faire connaître des ouvrages, numériques ou au format papier, notamment publiés sous licence libres ou en « open access ». À chaque fois, un glossaire sera proposé pour définir certains termes utilisés dans les différentes contributions.

Curseurs sera diffusé via le web et sous la forme d’une revue papier tirée à 5000 exemplaires et déposée dans différents points de dépôts dans toute la région bruxelloise. N’hésitez pas à vous abonner pour le recevoir directement dans votre boîte aux lettres.

Pour ce premier numéro, nous avons choisi de nous pencher sur le smartphone. — Pour introduire une réflexion critique sur le numérique, quel meilleur sujet que ce petit ordinateur, qui tient dans notre poche, nous permet en tout lieu et à toute heure d’accéder à nos vies numériques, mais qui en concentre aussi quantité de problématiques ?

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